par vétéran Berner von Pommern » Mar Avr 08, 2008 10:57 pm
Les évènements avaient été plutôt rapides et n'avaient guère laissé le temps à Berner von Pommern de se ressaisir. Le russe l'avait ganté et son honneur d'officier ne pouvait le supporter. Assurément, il garderait un tant soit peu d'énergie pour tancer ce freluquet. Se moquer ainsi de la Prusse, alors que c'est une prussienne qui a fait la Russie d'aujourd'hui, c'en était trop pour son orgueil de Prussien.
Mais pour le moment, la bagarre était générale et après avoir évité et donné quelques coups, il repéra son anglais préféré. Sa manière de se battre était quelque peu nouvelle pour lui. Il en avait bien entendu parler par son ami Karl von Schwerin qui avait voyagé en Angleterre avant d'intégrer l'Académie militaire de Berlin, mais qu'importe! Même si le sabre et le tir au pistolet étaient ses points forts, il s'agissait de s'adapter à tous les champs de bataille.
Se saisissant d'un tonnelet à moitié vide, il interpella l'anglais:
Votre manière, Monsieur, est peut être très académique dans votre pays, mais pour moi, cela ressemble à un ballet de l'opéra de Milan. Vous feriez bien d'arrêter de gesticuler ainsi et attrapez donc cela.
Il lui jeta dans les bras le tonnelet. Légèrement déséquilibré par son poids, l'anglais mit un pied en arrière pour se rétablir. Dans le même temps, Berner von Pommern s'était saisi d'un crochet dont se servait le tavernier pour remonter ses tonnelets de la cave. Muni d'un long manche, il lui permit de saisir le pied d'appui de l'anglais par la cheville et d'un coup sec tira pour le déséquilibrer.
L'infortunée danseuse s'étala de tout son long et sa tête vint heurter violemment le sol. A moitié inconscient, l'anglais releva la tête pour tenter de se relever et se retrouva assommé par le tonnelet qui termina sa chute en se fracassant sur son crâne.
Andreas, en connaisseur, avait apprécié la manœuvre:
Bien joué Friedrich, mais fait gaffe quand même à la marchandise. Il restait encore quelques litres. Mais au moins, ils ne sont pas perdus pour tout le monde...
ajouta t'il désignant l'anglais dont la tête baignait dans l'alcool. Berner von Pommern chercha Serov du regard. Un jour, il relèverait son défi, mais pour l'heure, il s'agissait de lui faire passer l'envie d'être né. Il était en compagnie d'un nouveau venu. Faisant signe de la tête à Andreas en direction des deux russes, les deux hommes s'en approchèrent juste au moment où ils se satisfaisaient d'avoir rendu la monnaie de sa pièce à Jenkov. Friedrich et Andreas tapotèrent gentiment l'épaule de leurs hôtes, qui surpris se retournèrent sans réfléchir. Les deux russes reçurent alors chacun une formidable droite en pleine mâchoire. Argna fut littéralement projeté sous le coup d'Andreas le bucheron en dehors de la taverne, brisant la porte au passage. Le comité de réception cosaque eut tôt fait de s'en saisir et le dépouiller tel un jeune élève officier la première nuit à l'Académie.
Serov pour sa part recula de quelques pas. Berner von Pommern n'avait pas la force physique de Vitali ou d'Andreas, mais il savait se battre et tout Capitaine qu'il était, il ne laissait pas sa part aux chiens.
Vous avez le bonjour de la Prusse, mon mignon.
Le russe, trop imbibé par l'alcool, tardait à récupérer. C'était au moins un avantage pour les cosaques. Tellement habitués ou plutôt imbibés de vodka qu'ils étaient, ils pouvaient garder l'esprit clair un minimum. Enfin toujours plus que les Pavlov. Habra avait décidément raison, la noblesse russe avait vraiment des manières efféminés...
Friedrich en profita pour lui asséner un coup de pied mémorable qui à coup sûr devait empêcher toute progéniture pour longtemps. Il ponctua:
Ca, c'est de la part de Katarina die Grosse... Vous, un féru d'histoire et de connaissance, devez certainement vous rappeler de qui il s'agit...
Serov se tordait de douleur agenouillé au sol. Berner von Pommern décida de battre le fer tant qu'il était chaud. Il avait appris cela à l'âge de 12 ans, lorsqu'il se promenait au village et visitait le maître de forge. Il asséna donc un nouveau coup de pied dans la machoire du russe, coup qui le fit basculer en arrière à demi conscient.
Et ça, c'est de la part du Franz Berner von Pommern, Colonel du 1. Régiment d'Infanterie de Poméranie et tombé à Iena.
Berner von Pommern s'était surpris à se déchainer sur ce pauvre russe. Mais les mots qu'il avait prononcé un peu plus tôt dans la soirée l'avaient profondément blessé. Il ne pouvait laisser la mémoire de son père salie par un jeune puceau imberbe et magnièré. Avec Andreas, ils prirent Serov par l'épaule et le fond du pantalon et l'envoyèrent se rafraichir les idées à l'extérieur avec son ami Argna.
Allez donc vous rafraichir les idées, Monsieur...
dit il en ponctuant ce dernier mot de tout le dédain qu'il pouvait lui témoigner.
Gott mit uns