Le 29 février 1812, dans une tente d'infirmerie sur les bords de la Bérézina
Un soldat tentait difficilement de se relever, luttant contre une terrible douleur. L'infirmière la plus proche, apercevant le soldat enfin sorti de son sommeil de trois jours, s'approcha de lui pour le calmer.
"Ne tentez pas de vous relever, vos blessures ne sont pas encore parfaitement cicatrisées, et puis la tente est plus froide hors de vos draps"
La douleur rappela l'homme à l'ordre. Se touchant le visage, il sentit le relief du sang coagulé du bas à droite de sa mâchoire jusqu'à sa tempe, traçant une sorte de U qui devait le défigurer complètement. Son nez également avait été aplati.
"Que m'est-il donc arrivé?
_ On vous a retrouvé parmi les blessés sur le champ de bataille près de..."
_Les russes ont perdu?" L'envie de poser cette question était s'imposait à lui, comme si toute sa vie dépendait de la réponse.
"Oui, et ils ne sont pas près de s'en remettre! Quand on perd alors qu'on est plus nombreux, ça laisse de traces!"
L’infirmière redevint soudain plus sérieuse
"Bon, maintenant que vous êtes réveillé, je vais pouvoir faire mon rapport. Voyez vous votre uniforme est dans un tel état que je ne peux même pas déterminer le régiment auquel vous appartenez, et comme vous devez l'avoir compris un cavalier vous a amoché au point de rendre toute identification par les autres soldats impossible."
Un temps de silence assez pesant suivi, soudain souillé par l'infirmière, pressée par ses occupations
"Donnez-moi donc votre matricule! Ou au moins votre nom, je n'ai pas que cela à faire, il y a d'autres blessés!
_Oui, j'avais compris, simplement, c'est la plus grande honte d'un soldat, son pire cauchemar..."
Il prit alors un air aussi grave que ses cicatrices lui permettait d'afficher sans douleur, marquant un temps de pause, comme pour digérer des paroles qui allaient bouleverser sa vie. La larme à l’œil, il dit alors:
"Je ne sais plus mon numéro de matricule, ni même mon nom... Ce doit être une amnésie"
RP à suivre dans les prochains jours