par vétéran Proot » Mar Jan 14, 2014 12:28 pm
Plusieurs jours passèrent sans dissiper l'inquiétude de Proot.
Enfin, un des cavaliers renvoyés chercher Van Wetterghem revint. Il apportait une lettre que Proot s'empressa d'ouvrir:
"Mon cher supérieur,
Je ne bénirais jamais assez votre sagesse pour m'avoir envoyé un message écrit dans une langue compréhensible ! Je ne comprends strictement rien aux salmigondis déversés par certains êtres suffisants et les scribouillis des panneaux de direction sur les routes relèvent pour moi de l'écriture néanderthalienne. Je ne communique plus qu'avec des signes.
M'étant perdu en route, un type complètement hirsute et habillé en peaux de bêtes s'est quasiment jeté sur moi en hurlant.
Je me suis vivement reculé et m'apprêtais à le châtier durement en sortant mon sabre. Mais le chef de mes fusiliers, (enfin, celui qui essaye de comprendre mes ordres et qui les rebascule aux autres) m'arrêta la bras.
Devant son regard suppliant, je relâchais mon sabre dans son fourreau et examinais le petit être velu.
Court sur pattes, vêtu d'une superposition de peaux de bêtes, on ne distinguait aucun style, si ce n'est un vague air oriental, en partie donné par des babouches et un shako informe.
A l'examen, il paraissait plus riche que les paysans qu'on croisait, montés sur des petits chevaux robustes. Quand on passait à côté, les soldats russes criaient "Kauzâques"en faisant un détour. Au début, je pensais que c'était à cause de l'odeur pestilentielle qu'ils dégageaient, mais, à présent, je pencherai plutôt pour de la crainte.
Bref, en regardant de près l'énergumène, ses larges boucles d'oreille en or, son dentier ferrailleux, ses bacchantes lissées à la graisse et son embonpoint me faisaient supposer qu'il s'agissait là d'un chef de ses paysans. Ca devait être une sorte de paysan-combattant car il avait des armes (sabre courbe, fusil et même pistolet). Pour ça qu'ils s'appellent "Kausâques" sûrement !
A force de mimes et de grands gestes, je finissais par piger qu'il m'invitait à le suivre pour détrousser des franskys. Etant perdu, sans ordres, je me décidais à le suivre malgré la crainte manifeste qu'il semblait provoquer parmi mes fusiliers."