Retour à la vie...

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Retour à la vie...

Message par Jean Bailly » Dim Fév 04, 2007 1:09 pm

Le cul de bouteille du tord boyau luisait aux flammes de l'âtre. Les formes se dessinaient dans la pénombre de la pièce sentant le renfermé, le pain et l'alcool à plein nez... Une bien piètre chaumière après tout ce qu'il avait donné pour l'empire... La bouteille tomba de la table sans même qu'il n'essaie de la rattraper, les songes et l'esprit épongeant avec difficulté le chouchenn de notre bon Pater de la paroisse Sainte Brigitte... Enflure s't'alcool, il traverse le système aussi vite que les cuirassiers de Murat à Ulm tiens...

Le feu crépita et il décida de se tourner face à la lumière pour se réchauffer le visage et se réveiller un temps soit peu au passage. C’est alors que l’on frappa à la porte en rugissant les paroles si familières et dénonciatrices du devoir et du sang… Bordel qui sonna si fort aux oreilles qu’il grimaça sous le mal de crâne et la résonance désagréable ne quittant point la pièce, pourtant bien petite par rapport aux palais de Messieurs les Maréchaux.

Entamant une courbette dans le vide, il ramassa le pichet d’eau sur le vaisselier, si l’on peut l’appeler ainsi tant il était miteux et comportant que deux trois assiettes italiennes et quelques verreries egyptiennes. S’aspergeant la figure et le pourpoint bleuté, il prit le vieux linge lui servant de serviette et s’essuyant immédiatement en gueulant t’attendre bordel tant les frappes à la porte se faisaient insistantes et salvatrices d’un nouveau voyage au bout du monde…

Arrivant devant la porte il distingua dans les lueurs filtrant à travers la porte les faibles rayons de la pleine lune, éclairant avec l’aide de la cheminée l’uniforme propre et accroché à un porte manteau contrastant avec le reste de la maisonnée tant par son élégance que par le raffinement de l’ouvrage. De l’hêtre, doux et luisant au touché…

Les images lui revinrent alors même qu’il se tenait droit devant la porte, le soldat à l’extérieur ordonnant d’ouvrir immédiatement, qu’il faisait un froid de Russe dehors…

...Le Maréchal fut fauché par le bombardement effroyable des tirs Autrichiens. L’Empereur lui même n’y croyait pas et toutes les troupes sous les ordres de Lannes s’arrêtèrent sous le poids des canons, de la brume de guerre et le malheur de la perte de cet homme exceptionnel… Coincés entre l’armée Autrichienne et le fleuve, les armées en rangs serrées tentaient tant bien que mal de s’organiser et de tirer sur les positions Autrichiennes avançant inlassablement, menaçant de refluer dans une hécatombe palpable les troupes Françaises sous les ordres de l’Empereur lui même. Les renforts de Davout arrivèrent et c’est dans un fracas douloureux que le pont de l’espoir s’écroula et ralentit le salut des milliers de soldats luttant pour tenir l’ennemi à distance.

Les images s’estompèrent alors même qu’il se rendit compte qu’un autre soldat était arrivé de l’autre côté de la porte et beugla son nom avec force...

Il ouvrit la porte avec fracas, toisant d’un regard mauvais les deux Marie-Louises.


Qu’est ce que c’est que ce bordel, nom d’un pan freluche de basse-cour ?! Vous croyez vous adresser à qui comme ça !

Les deux jeunots se firent petits alors qu’un officier les écarta et remit une lettre fermée du sceau de l’Empire.

Sous Lieutenant Bailly, votre permission et votre demande de quitter l’armée ont été remis à jour. Vous êtes demandé à Rennes pour reprendre vos services. Vous partirez immédiatement pour le front sous les ordres de l’Empereur Napoléon…

...Les images de la bataille fusèrent alors que l’officier lui donnait ses ordres et lui expliquait qu’il était aussi peiné par la mort du Maréchal Lannes.

Le pont fut remis sur pied par le génie de Davout alors que l’on perdait de plus en plus d’hommes. Le lieutenant fut touché et je me retrouvais avec les quelques 400 Normands et Bretons restants sous mes ordres. Dieu m’en est témoin, je maudissais cet officier d’avoir été aussi imprudent et de m’octroyer la responsabilité de tant d’hommes dans un contexte désastreux. Sans vraiment réfléchir, peut être aussi gueusement que cet imbécile de Maureau, je sortis mon sabre et m’avançais en première ligne gueulant de cesser le feu.

Resserez les rangs bandes de larves !

Sous les détonations des canons et de l’étouffement et craquements des impacts sur les compagnies strasbourgeoises de la 978e à l'Est de notre position, mes hommes s’adonnèrent à reformer une ligne compacte, les visages blêmes et bien mal en point. J’hurlais de recharger alors qu’un crépitement lointain vint pulvériser la première ligne dans un sifflement macabre. Une bonne trentaine de Normands s’écroulèrent dans quelques cris de douleurs et le sang giclant de quelques artères en bouillie.
Je m’avançais en avant de la ligne, levant mon demi arçon Leclerc, sabre dans l’aure main.

Visez !

Les compagnies baissèrent les An IX, baïonnettes au canon, en une vague synchronisée et visèrent les rangs autrichiens avançant au pas au loin derrière la brume des vagues de tirs et de la terre retournée, faisant trembler le sol en une vibration répétitive et effrayante.
Alors que je me rendais compte que les compagnies voisines avaient suivi les ordres de mes propres hommes, je sentis l’adrénaline affluer, faisant trembler chaque parcelle de mon corps de cette excitation propre au pouvoir de donner la mort.

L’ordre de tirer donné avec force, les fusils explosèrent sur plusieurs secondes, faisant jaillir une fumée compacte grisâtre, embaumant les vêtements de poudre cramée et de cette odeur caractéristique d’une journée peu joviale…

En ce jour de Brumaire, j’étais devant ces quelques bouffons n’ayant jamais connu cette peur et l’estomac retourné par la chair brûlée et le craquement de la baïonnette dans les côtes d’un ennemi, quel qu’il soit.
Je pris mon uniforme à côté de moi, en mettant mon tricorne noir à la rose française épinglée sur le côté. Alors même que je fermais la porte derrière moi, je puis apercevoir que les soldats étaient pressés et s’étaient déjà occupés de mon cheval…

Rennes, combien de Marie-Louises allaient être victimes de la conscription cette fois-ci…

Je rejoignais le front pour rejoindre ma vraie vie, celle du sang et de la poudre…
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Message par Jean Bailly » Mar Fév 06, 2007 1:48 am

Alors qu'il marchait pour regarder un à un les shako sur la tête, uniforme de compagnie de ligne soigneusement lavé et parfaitement ajusté, il mâchouillait des morceaux de bourrache, les mains dans le dos.

Il s'arrêta pour regarder au loin la brume qui envahissait les plaines en face de lui et toucha la cocarde de shako, ainsi que sa plaque en forme d'aigle signifiant par quelques chiffres le numéro de son bataillon et en l'occurrence de la compagnie qu'il menait.

Les Marie-Louises étaient là... On avait rogné quelques vielles culottes aux compagnies en faisant bouillir le lait pour les faire accéder au titre de sergent et chef de section.

Il racla sa gorge et cracha une immondice dans l'herbe et appela un pousse-caillou.

Un soldat vêtu d'un long manteau gris-marron et d'une belle giberne sortit du brouillard à quelques pas de là et se présenta en saluant le sous lieutenant.

Après quelques secondes de silence, alors même que l'officier ajustait la bordure façonnée de sa visière, il prit la parole d'un ton détaché mais ferme.


Baïonnette au canon.

Le soldat répéta l'ordre qui fut répété à son tour sur toute la longueur de la longue ligne de fantassins bleues et blancs.

Les cliquetis multiples se firent entendre et après quelques secondes, l'armée était hérissée de lames grisâtres et non plus de canons noirâtres ne dépassant que de peu les shakos du bataillon. Le Sous Lieutenant donna l'ordre suivant avec résignation cette fois-ci...


Faîtes vibrer les grenadières que l'on voit de quel bois se chauffe ces colbacks Normands et Bretons !

Alors que le sergent gueulait les ordres dans la purée de pois, les batteries se mirent à percer la silence ambiant dans un rythme agressif et puisant l'excitation de chacun au plus profond d'eux même.

Cela faisait des semaines qu'ils marchaient vers le front et ses ordres avaient été clairs : Disperser à l'aide du bataillon de Picardie de Ladère et Normands de Duval les soldats Prusses récalcitrant à rendre les armes et faire taire les imbéciles une bonne fois pour toute.

Le rythme de tambours fut repris au loin par Ladère et Duval et les officiers se placèrent devant leurs hommes en sortant leurs sabres-briquets.

L'ordre fut hurlé une fois de plus, et les troupes avancèrent au pas dans un froissement d'uniformes, un raclement de cuir et l'étouffement de centaines de bottes sur l'herbe humide.

Le Sous lieutenant sortit son pistolet ainsi que son sabre et se mit entre les deux compagnies distinctes de quelques mètres à peine.
Ainsi les deux lignes avançaient dans le brouillard, épargnant tous bruits de parvenir aux oreilles des uniformes verts.

Le premier tir sortit de nul part et vint se ficher devant une rangée de briscards ne bronchant d'un centimètre et avançant résignés le dos droit et le fusil sur l'épaule...

Les officiers de premières lignes crièrent des ordres et la première rangée de fantassins abaissa les fusils comme pour charger, en une magnifique synchronisation, pour donner une apparence d'hérisson à cette masse organisée foulant l'herbe raz d'un champs bien loin de la belle France.

C'est alors que le brouillard distingua quelques ombres alignées montées de chapeaux divers et variés, contrastant avec les beaux régiments unis de l'armée d'Essling.

Au sein même de cette ambiance grisâtre et étouffante, une série d'éclairs jaunes filtrèrent avec des claquements caractéristiques de la mort jalonnée par la poudre et c'est alors que quelques dizaines de soldats s'écroulèrent en poussant d'étranges gargouillis et de sombres cris de douleurs.

Jaillissant à travers la marche du bataillon et des coups de feu ennemis, les tambours redoublèrent d'intensité. Les deux compagnies se figèrent et la première ligne posa genoux à terre. Les fusils s'abaissèrent pour viser comme un mécanisme maintes fois répété.
Lorsque les tambours cessèrent, les tirs explosèrent de toutes parts pour ajouter la poudre et le brouillard de guerre à la purée de pois déjà bien épaisse.

Une autre volée de fantassins fut touchée de plein fouet et alors que les soldats s'écroulaient, la deuxième rangée mettait genoux à terre et rechargeait, et la troisième ligne abaissait les fusils en joue munis de baïonnettes.

Les tirs foudroyèrent une partie des ombres, à quelques dizaines de mètres devant, qui semblèrent hurler agonisant dans un langage peu enjôleur.

Le Sous Lieutenant courut rejoindre un sergent et lui ordonna de tenir les rangs et d'attendre l'ordre de charge. Celui-ci envoya les deux soldats le flanquant prévenir les autres sous officiers des compagnies. Ainsi, courant le dos baissé à travers le champ de bataille déjà empourpré de sang Français, deux ombres se faufilèrent à travers quelques rasades de balles et sifflements meurtriers.

La première ligne et seconde ligne genoux à terre rechargeait et mettait du temps à se relever, sûrement apeurée et tremblant de toutes parts, ne visant point le tube pour nettoyer la quincaillerie.

D'autres éclairs explosèrent par saccades et mirent à terre des fantassins en faisant valser une ligne entière de soldats dans une parodie d'une chute grotesque.

C'est seulement à ce moment là que les deux lignes se fondant en une seule reprit forme sous les ordres criés des sous officiers dictatoriaux.


Ils déchirent la mousseline !

Première ligne genoux à terre !

Première, deuxième ligne, en joue !

Le vacarme du peloton reprit dans une fumée âcre et une pétarade organisée... Le Sous Lieutenant, n'attendit point de plus amples victimes, les impacts avaient sonnés étouffés, et avait sûrement fait mouche.

Les grenadières reprirent les battements, mais cette fois-ci avec plus d'intensité.

La charge lancée, les hommes avancèrent en rangs en criant de toutes parts dans une grande volonté sanguinaire et dévastatrice. Les sous officiers levèrent leurs sabres et coururent vers les positions ennemies suivis de près par l'attroupement de moins en moins compact de fantassins.

Les coups de feu ne suffirent apparemment pas à empêcher le flot soutenu de Français et les cris et cliquetis semblaient prendre le dessus sur la mitraille et heureusement aucunes trinqueballes.

Chargeant tout autant que les autres, le Sous Lieutenant arriva dans le tas entre les deux compagnies et visa la première tête verte et noire regardant vers lui ; Le tir explosa la caboche du palanquin. Voyant une forme se rapprochait sur son flanc il eut juste le temps d'enfoncer son sabre dans le ventre du Prusse pour le ressortir chaud et humide, l'ennemi s'écroulant devant lui, la main au ventre.

Une pétarade reprit sur les côtés alors qu'un sergent Français levait son sabre dans les airs et qu'une partie résistante s'effondrait et projetait ses armes autour d'elle dans quelques douleurs et viles facéties des dégâts d'une balle et de plusieurs baïonnettes. Le Sous Lieutenant enjamba plusieurs corps et ajusta plusieurs coups de fer sur quelques uniformes encore debout, les Prusses ne maîtrisant plus leurs forces et leurs dextérité... Le moral de l'ennemi avait atteint des fonds et déjà les sections Prusses battaient en retraite sous le feu nourri et discontinu des fusils Français.

Pauvres gars... Il regarda autour de lui et distingua quelques visages figés... Des jeunes gars en plus, même pas de poils... Il cracha dans l'herbe et maudit sa résurrection dans cette vie de sombre besogne et de haine.


Et l'Empereur ordonne aux troupes de rejoindre le front Russe. J'ai tout gagné...

La bataille était gagnée, mais à quel prix...
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