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Eugène Bargemont a écrit :Je connais un peu oui. Je suis plus du côté de Gembloux.
Russie, 22 novembre 1813
Ma Chère Epouse,
Après l’épreuve des routes, celle des premiers combats, voici maintenant l’heure d’affronter notre pire ennemi : le froid. Voilà deux jours qu’il a commencé à neiger légèrement, mais la nuit dernière le général hivers a sorti ses lourds flocons pour revêtir l’immensité qui fait notre quotidien d’un lourd mantel d’hermine blanche.
Ce n’est pas sans émotion que le spectacle matinal m’a offert le souvenir de nos veillées de Noël dans le bocage d’Aubel.
Brève trêve d’émotion lorsqu’il me faut veiller aux hommes, ces hommes de chez nous qui m’ont suivi au-delà de la raison sur la seule foi de servir une juste cause.
Si vous saviez combien ils sont admirables. Jamais une plainte, toujours prêt à aller de l’avant.
Je dois cependant vous faire part d’une décision d’importance que les circonstances m’ont amené à prendre : j’ai quitté le prestigieux Vème Corps d’armée tant il était difficile d’y prendre digne place auprès d’hommes aussi aguerris et rompus d’automatismes.
Un homme de valeur, le Colonel Galiffet, m’a alors conseillé de rejoindre le IIIème Corps sous les ordres du Colonel Pontmercy : un nom, des états de service, un brave !
Je me suis résolu de suivre ce conseil et je dois dire que l’accueil est bien engageant. Il nous faut maintenant reprendre la route pour rejoindre notre nouvelle unité et son front.
Je vous écris ces quelques lignes alors que clairons et tambours rassemblent les hommes dont les pas crissent dans la neige fraîche encore pure et blanche. Je prie Dieu pour qu’elle ne boive pas trop leurs sang dans les semaines et mois à venir.
Chaque homme de mon bataillon qui tombe est un peu une de mes racines qui se meurt. Heureusement je vis de la riche sève de votre souvenir qui me donne vigueur et espérance.
Victor Rogier me seconde à merveille, cet homme est pour moi un roc sur lequel je puis m’appuyer sans réserve ; dites le à sa femme qu’elle en tire légitime fierté.
J’espère que cette missive vous trouvera vous et nos enfants au mieux et qu’il en est également ainsi des affaires du Département.
Avec mon meilleur souvenir.
Eugène
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