La situation des Jägers était devenue critique. Ils reculaient depuis des semaines subissant des pertes innombrables. Les corps portant les insignes Oranges aux armes de la Tsarine s’amassaient dans les plaines de l’est sans que l'on ait encore le temps de les enterrer.
Cette situation avait de gràve répercutions sur le moral et l’humeur des hommes et des officiers. Certains en étaient venus à se quereller ouvertement provoquant démissions et désorganisation jusqu’à la table de son Altesse la Tsarine.
Dans cette situation les festivités prévues autour de la visite de la prestigieuse marraine du régiment avaient été interrompues.
La Tsarine avait eu de longues réunions de travail avec le Commandant Viersky et les principaux officiers du régiment.
Elle alla même jusqu’à visiter le front incognito sous la protection rapprochée du Capitaine Kipik et du Lieutenant Roustropov.
Après une ultime et longue réunion de travail, un certain nombre de mesures radicales furent adoptées.
A l’aube de ce 23 juin 1813, un appel général du régiment fut sonné.
Les hommes se précipitèrent à pas lent (fini d’accourir enthousiaste) vers le rassemblement, les uniformes étaient défaits, troués ensanglantés. Les regards durs et cernés par les efforts et les sacrifices endurés.
Malgré tout la discipline des Jägers refit surface et le carré fut formé, les bannières usées des bataillons claquaient au vent.
Un spectacle inattendu s’offrit alors aux Jägers. Au lieu du Commandant Viersky, ce fut la Tsarine qui fit son entrée dans le carré. Le Commandant Viersky était derrière elle ainsi que le Capitaine Miaskovski.
Mais ce qui laissa les Jägers pentois, bouche-bées c’est que la Tsarine était en uniforme de Jägers. Certains avaient même eu peine à la reconnaître.
Après un ultime roulement des tambours, un silence long et profond se fit.
C’est le moment que choisi l’impératrice pour prendre la parole d’une voix claire et forte.
Valeureux combattants du XXIIème Jägers
Mon cœur saigne de voir tant des vôtres manquer à l’appel aujourd’hui.
Mon cœur saigne de voir les franzkis avancer malgré vos efforts acharnés.
Ma joie est grande de voir la valeur des combattants de ce régiment.
Ma joie est grande de vous voir remonter au front coûte que coûté avec opignatreté malgré les épreuves.
Ma colère gronde lorsque je vois que quelques uns ou unes sèment la discorde ou ne bougent pas d’une semelle malgré les appels de leurs chefs de section.
En plein accord avec le commandement du régiment, un certain nombre de décisions ont été prise que je vais maintenant vous communiquer.
La première est particulièrement importante. Le Commandant Viersky a remis entre mes mains son brevet de Commandant du Régiment souhaitant pouvoir reprendre un commandement plus effectifs au combat à la tête du 6ème bataillon de Jägers voire d’une section.
J’ai accepté sa requête et le remercie pour les mois de commandement qu’il a si bien assumé et je sais que le régiment pourra encore compter sur lui.
Ceci dit, j’ai décidé de remettre le commandement du Régiment au Capitaine Vladislav Miaskovski qui par ses qualités d’Officier et d’organisateur saura reprendre le flambeau avec brio.
Après un instant de murmure à l’annonce de ce changement à la tête du régiment, les hommes se mirent à scander les prénoms des deux officiers Anton Anton Anton ! Vlad Vlad Vlad !
Sur un geste de la Tsarine le silence revint.
J’ai maintenant le pénible devoir de vous annoncer :
Qu’il a été mis un terme à la période d’intégration des Ss-Lieutenant Adina Cornéa et Nonhov qui ne pourront intégrer le régiment définitivement par manque d’activité.
Que je viens de retirer le brevet de commandement du Ss-Lieutenant Azzak pour le même déplorable motif.
Que je demande à chacun de veiller à son engagement et à son activité au sein du régiment. Par sa nature les Jägers doivent être disponibles pour assumer leurs missions spécifiques avec rapidité et efficacité. Il n’est pas exclu que d’autres renvois interviennent dans les semaines à venir même parmi des Officiers chevronnés. Nous espérons que cela ne s’avère pas nécessaire.
Heureusement ces cas sont rares. J’ai ainsi le plaisir d’appeler ici :
Le Lieutenant Zark, Le Lieutenant Bero et le Ss-Lieutenant Guillaumevitch.
Messieurs vous êtes de jeunes officiers dont la conduite au front est digne d’éloge. Vous avez démontré avoir les qualités nécessaires pour faire partie des cadres de ce régiment et cela au moment où la situation du front était difficile c’est d’autant plus méritoire !
Je vous décerne donc vos brevets de commandement d’un bataillon de Jägers avec les droits au port du titre, à la solde et à la pension que cela comporte.
Lieutenant Zark est muté du 26ème bataillon de Jägers au 11ème et breveté auprès de ce bataillon.
Lieutenant Bero est muté du 23ème bataillon de Jägers au 5ème et breveté auprès de ce bataillon.
Le Ss-Lieutenant Guillaumevitch est muté du 27ème bataillon de Jägers au 19ème et breveté auprès de ce bataillon.
Les trois Officiers reçurent leurs brevets en criant Tsarine Nous voici ! cri repris en cœur par l’ensemble du régiment dans un grondement sourd.
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Maintenant qu’on apporte mon présent :
Un chariot s’avança lourdement chargé. Le Comte Tchernitchev suivait le chariot mais s’en détacha pour apporter respectueusement à la Tsarine un objet effilé et brillant.
Jägers ! pour vous récompenser de votre bravoure je vous fais ce petit présent. Elle leva l’objet au dessus de sa tête et tous purent alors voir qu’il s’agissait d’une baïllonnette.
Pour chacun d’entre vous une baillonnette neuve à mes armes et avec la devise du régiment gravée. Elles ont été ouvragées dans les meilleurs ateliers de St Pétersbourg : J’espère que vous saurez en faire bon usage ! En plus des uniformes neufs vous serons distribués pour que les ennemis de notre mère Russie sachent que les Jägers reviennent plus fort que jamais !
Les baillonnettes rutilantes étaient maintenant distribuées et les hommes les avaient maintenant au bout des fusils qu’ils faisaient s’entrechoquer dans un bruit métallique assourdissant.
Jägers que Dieu vous ait en sa Sainte-Garde !
Anton Viersky prit alors la parole.
Messieurs ce fut un honneur pour moi que de commander ce régiment que j’ai vu naître. Mais sans vous un régiment n’est rien ! Jägers merci ! et vive notre Tsarine et le Commandant Miaskovski !
Il va de soi que la Taverne vous attend !
Le tumulte fut indescriptible…