Procès international
(suite de la précédente gazette)
Je ne sais quels sont les échos qui vous viennent de l'extérieur étant donné que je suis dans une fort curieuse situation, que je vais vous expliquer en détail. Pardonnez-moi donc si je reprends les mots d'un confrère qui aurait déjà parlé de cela.
Comme je vous le disais il y a une semaine, le duel entre messieurs Leto et Marbot ayant été saccagée, l'affaire avait été portée, pour la première fois de l'histoire, devant un tribunal international.
Le procès s'instruisit, en dehors de quelques romantiques échauffourées déblatérant des phrases toutes plus pelucheuses, roses et "guimauvesques" si l'on peut dire que les autres, en dehors encore de quelques témoins imbibés d'alcool, en dehors pour finir de quelques réquisitoires lancés depuis l'assistance demandant la mort, le procès s'est correctement déroulé et la sentence a été rendue : la mort pour l'officier Nonhovito et 20 coups de fouet pour l'officier Styr, les condamnations étant donnés par la Russie et les peines exécutées par la France.
Ce jugement provoqua un véritable tollé en a ville de Letobourg, ville, nous le rappelons, instigatrice du duel, le litige premier en étant le nom, et dont les habitants, non content de s'être renommés 2 fois déjà, veulent encore changer de nom pour vivre à présent dans Styrgrad, en hommage à son "libérateur et maintenant martyr". Plus grave encore, les soldats russes refuseraient de combattre si la sentence était appliquée, considérant que Mr Styr n'est en rien fautif !
Tandis que ce procès tournait au rocambolesque, la populace discutant une Justice pour une fois universelle et non-arrêtée par les frontières, il prit soudain un aspect dramatique !
Il s'avère en effet que tout cela n'était qu'un piège pour attirer des Français de haut rang dans les prisons russes.
Tandis que les juges et quelques dignitaires russes tentaient de ramener la situation au calme, le juge russe Anton Tchekov, dont la première parole, celle de nous traiter en égaux si nous venions, avait été bafouée, nous a assuré personnellement qu'il ne nous sera fait aucun mal, alors qu'un cosaque manifestement saoul venait de tirer sur un soldat français avant de s'enfuir !
Le juge Tchekov n'a souhaité répondre à aucune des questions que nous lui avons posées, et a même donné l'ordre d'étouffer la liberté de la presse, en donnant celui de m'étouffer moi !
Nous sommes, à l'heure où je vous parle, emprisonnés en Letobourg/Marbotville/Styrgrad, sous la garde de l'élégant et, espérons le, plus respectueux de l'honneur que tout les autres Russes auxquels nous avons eu affaire ici, le gouverneur Frog.
Nous tenions avant d'envoyer cette missive par l'un des contacts d'un journaliste russe infiltré dans les rangs des grenadiers, à signaler le comportement du principal accusé, l'officier Styr, qui fut tout au long de cette mascarade exemplaire de sang-froid et de sollicitude, ne se cachant pas et allant jusqu'à proposer au Colonel Marbot des solutions pour réparer sa mutilation.
Peut être cependant était-ce fait exprès, qu'il savait comment cette pièce de théâtre allait se terminer, qu'il avait des connaissances haut-placées ayant organisé tout cela...
N'est-il pas le plus jeune chef de bataillon de l'armée russe ? Comment en arriver là sans appuis solides, sans alliés pouvant le décorer comme le sortir d'un mauvais pas ?
G. P.
Edition interne au IV° CA
Journal d'information du IV° CA
Edition spéciale du 9 juillet 1812
Rebondissement dans l'affaire du procès Russe :
Comme nous vous le révélions hier dans notre précédente édition, les juges Français et Russes s'étaient mis d'accord sur les condamnations, l'exécution des sentences devant se faire ce matin a l'aube.
Nous venons de recevoir une missive d'une extrême gravité. En effet, des troupes russes en armes sont entrés ce matin dans la ville de Letobourg. Rappelons que le port des armes dans cette ville étant interdit pendant la durée du procès. Ces troupes en intervenant on donc empêché in extrémis l'exécutions des sentences prononcées. Mais ceci n'est pas le plus grave. On nous apprend aussi que lesdites troupes (on ne nous a pas fourni le nom du régiment) auraient par ailleurs arrêté, et ce en toute traitrise, les officiers français encore présents. Parmi eux se trouvant le juge Jean Bailly, ainsi que des officiers appartenant à plusieurs régiments notamment Bouchu, Lejeune, ainsi que notre camarade Guila.
Il semble à l'heure actuelle qu'ils ont simplement été fait prisonniers. On nous rapporte aussi (source russe), que le CAM Guila souffre de maux de ventre.
Une telle traitrise montre bien que les russes sont un peuple sans honneur.
Adj Le Boucher