Gazette de Russie
gazette
24 octobre 1812
ÉDITORIAL
Bonjour à tous et merci d'être fidèles à notre Gazette qui fait suivre ses hors série.
Pour cette édition, 4 récits exaltants d'officiers n'ayant pas que du courage, mais aussi une verve à faire pâlir les ténor du barreau !

Bonne lecture à tous !
La Rédaction .
separateur
Récits
Le jour se lève, la fraîcheur du matin fait frissonner les soldats encore endormis.
Le chef de bataillon DE CASTILLON scrute l’horizon pour tenter de repérer les troupes françaises qui depuis 3 jours lui donnent du « fil à retordre », ainsi qu’à ses hommes.

DE CASTILLON secoue son adjudant allongé à même le sol :

Le jour se lève, allez réveiller la troupes et faîtes moi un état des forces disponibles.

Au loin, une estafette arrive.

Halte là ! fait le garde en faction.

Je suis le lieutenant SMIRNOVITCH, j’ai une missive du Major ROUSKOFF pour le chef de bataillon DE CASTILLON.

Le garde fait mettre pieds à terre à l’estafette et la conduit auprès de son commandant.

Après l’avoir salué, le lieutenant SMIRNOVITCH transmet la missive à DE CASTILLON.

Dois-je attendre, demande-t-il ?

DE CASTILLON prenant le courrier et sans le lire,

Oui, attendez.
Allez vous faire servir de quoi manger, je vous ferai appeler.
Suivez ce soldat, il va vous guider.

Ouvrant la missive

« Didier,

Depuis plusieurs jours, je vous demande beaucoup à tes hommes et à toi pour tenir la ligne sur cette zone de front. Mais tu sais à quel point votre secteur est primordial pour le reste de cette bataille.
TCHEKOV arrivera dans la matinée avec tous ses bataillons et commencera l’offensive dès midi.
Il va prendre les français par le flanc droit et j’ai absolument besoin que tes hommes et toi chargiez le bataillon de grenadier qui se trouve face à vous et ce à midi « tapant ».

Si tu y parviens, TCHEKOV pourra traverser les lignes ennemies et aller détruire les batteries de 8 et de 12 qui depuis le début, nous empêchent de prendre le dessus dans cette bataille.
C’est sous réserve, mais dans le même temps, la cavalerie de ARGNA devrait attaquer par le flanc gauche. Toutefois, sur ce point, je n’ai pas encore eu de confirmation de sa part quant à son opérationnalité pour le moment de la charge.

Je compte sur toi.

Ton ami et chef de régiment, ROUSKOFF. »

Adjudant ! Cria DE CASTILLON.

Quel est l’état de nos troupes ?

L’adjudant arriva très promptement

Chef,
Nous avons 23 morts, 31 blessés dont 12 dans un état critique et 146 valides.

Bien : dit DE CASTILLON

Qu’ils se préparent pour une charge, elle est prévue à midi ce jour.
faites venir à moi l’estafette du Major ROUSKOFF .

« bonjour mon ami,

nous avons beaucoup souffert ces jours-ci, les français sont tenaces et de vaillants soldats.
il me reste 146 hommes valides, je ne sais si ce nombre sera suffisant, mais nous ferons la charge que tu as demandé.
J’espère que cela permettra à TCHEKOV de remplir la mission qui est la sienne.
Je ne sais si ce soir je serai encore de ce monde pour pouvoir encore partager ensemble une bonne vodka ou un excellent cognac de la cuvée THEKOV, mais si tel est le cas, il te faudra penser à nous faire relever, mes hommes sont épuisés.
Amitiés,
Didier »

L’estafette arrivant, DE CASTILLON lui remit sa missive en précisant :

C’est en urgence pour le Major ROUSKOFF, partez immédiatement.

De Castillon se rend alors auprès de ses hommes et traversant le campement, les observe.

Certains n’arrivent pas à se réveiller, épuisés qu’ils sont.
D’autres sont en pleurs, ils tremblent, ils ne peuvent surmonter la baisse de moral liée aux attaques françaises de ces derniers jours.
Celui-ci n’ose bouger, il s’est fait « dessus », non pas par peur, mais par épuisement.
Ce blessé voyant arriver son commandant tente de se lever, mais rien n’y fait, il n’a plus la force.....
Celui là, ne fait même pas attention à son officier, il a repéré un rat des champs et se positionne pour tenter de le tuer avec sa baïonnette pour changer le quotidien des repas servis au camp.
Celui là a le regard béant ! Voit-il son commandant debout devant lui ?

De Castillon se rend compte qu cette mission semble être celle de trop.

Il est 8H00, il reste donc 4H00 avant midi.

Adjudant ! Crie-t-il. Adjudant, à moi.

L’adjudant arrive au pas et immédiatement.
Il sait que son commandant est à l’écoute de ses hommes et se trouve être très compréhensif, mais il n’accepte cependant pas un manquement aux ordres ou à la disponibilité de ses subalternes.
Tout est une question du concept de hiérarchie, celui des droits et devoirs.
Si De Castillon appelle, il faut répondre très vite à son appel.

Je suis là chef, quels sont vos ordres ?

Adjudant, vous avez 4H00 pour que nos hommes soient soignés, nourris, prêts à se battre.
Ménagez les, mais veillez à ce qu’ils soient ce qu’ils sont, des soldats de l’armée russe, des Baggovout et qu’ils soient aptes à charger.
Ce midi, en ce jour d’été, plutôt que de subir les charges des grenadiers français, nous seront de ceux qui attaquent, nous seront de ceux qui chargent.

Qu’ils soient en ligne, en position de charge dès 11H45.
Je viendrai leur parler.

L’adjudant saluant son chef, fait son quart de tour droite pour accomplir les ordres donnés, quand De Castillon :

Adjudant,
Merci à vous d’avoir servi sous mes ordres.
Je ne sais ou nous serons demain, mais je suis fier d’avoir eu un officier tel que vous pour me seconder.
Prenez ce sabre, il me vient de l’officier Léonardo lors d’une de nos batailles quand j’étais chez les Pavlov et je pense, le connaissant, qu’il approuverait que celui-ci vous revienne.

L’adjudant ne dit mot, impressionné par le discours de son chef, mais honoré par le geste qui lui laissait penser que derrière la « brute », se cachait un officier de valeur.


Après l’avoir salué et d’un regard, lui avoir signifié son merci, l’adjudant rejoignit de fait l’ensemble de la troupe.

A 11H30, l’adjudant vint prévenir son chef que les troupes étaient en rang, mais il précisa que l’état physique et moral n’était pas maximum pour la charge à venir.

De Castillon posa sa main sur l’épaule gauche de son adjudant et fit un sourire.

Suis moi l’ami, d’ici peu, nous irons à la rencontre de notre destin.

Je te veux sabre à la main.

De Castillon n’avait pas besoin de préciser cette demande, l’adjudant tenait le sabre d’une poigne de fer et avait bien l’intention de s’en servir pour trancher du français.

De Castillon quitta la tente et traversa les rangs pour se mettre au devant de ses hommes.

Il prit un temps de réflexion, de silence, scrutant l’ensemble de ses troupes.
Puis, montant sur son cheval, il bomba le torse et toisant les soldats alignés il s’adresse à eux :

SOLDATS !

Notre chef nous demande de charger ce jour à midi, le bataillon de grenadier qui se trouve face à nous.
Je sais tout comme vous, que les grenadiers français sont des troupes d’élite et qu’ils sont de fait, redoutables.
Depuis trois jours, ils déciment nos lignes, mais aujourd’hui c’est notre tour.

vous êtes épuisés, j’en suis conscient,

Mais vous êtes des soldats Russes, vous êtes des Baggovout.

Redressez vous frères d’armes, tenez vous droit.
Bandez vos muscles, crispez vos lèvres.
Dans un instant, je vais vous donner l’ordre de charger ces putains de couilles molles de grenadiers français et nous allons enfin leur montrer notre hargne au combat.

Soldats !

Baïonnette, au canon !

Soldats !

Pour la Russie, pour les Baggovout, pour ROUSKOFF, pour notre bataillon,


ATTENTIIIIIIIIOOONNNNNNN....

CHARRRRRRRRRRGEEEEEEZZZZZZ............


Et comme un seul homme,
Tous, même les blessés, tous, se ruèrent sur les troupes françaises, devancés par leur chef de bataillon, chargeant sabre au clair, pour les idéaux qu’ils partagent depuis le début de cette campagne.
Le principal étant la défense de leur mère patrie, celle de la sainte mère Russie.
Didier de Castillon
separateur
Récits
Cela faisait trois jours que la 21253ème compagnie d'infanterie était en première ligne au nord d'Ostankino. En face au loin, des français, des royalistes expatriés, les Partisans du Lys.
J'avais reçu l'ordre de tenir la ligne jusqu'à la relève qui se ferait le lendemain.
Personne n'avait vu se faufiler l'ennemi vers les marais proches, aucun homme ne les survellait pensant que personne n'oserait s'aventurer sur ce terrain. C'était mal connaître les voltigeurs du Lys.
Je discutais avec mes hommes pour détendre l'atmosphère et rendre l'attente de la relève moins longue.
« Les gars, Ostankino n'est pas loin, je vous promets une grande tournée à la taverne de la Madelon dès que nous serons relevés ».
Alors que mes hommes hurlaient leur joie, les voltigeurs commençaient leur travail de sape. Une première salve fut tirée, 5 hommes furent touchés mortellement, le reste de la troupe commençait à paniquer car nul n'avait vu d'où venaient les tirs.
« A terre! Vite! » hurlais-je.
Une autre salve fut tirée tuant 3 première classe et blessant légèrement 4 autres, mais l'ennemi était repéré, des fumées se distinguaient au dessus des roseaux des marais.
« Tir de riposte, canardez moi ces fumiers! » ordonnais-je.
Une dizaine de soldats se levait d'un seul tenant et tirait sur la menace. Des cris et des plaintes se faisaient entendre dans le marais, les tirs avaient fait mouche. J'envoyais une patrouille dans les marais, elle avançait prudement. A son retour, j'apprenais qu'il s'agissait de voltigeurs du Lys et que seulement 3 voltigeurs ont été tué lors de l'escarmouche.
« Des voltigeurs si près de nos lignes. Je n'aime pas ça. Caporal Gannac, allez prévenir la présence de voltigeurs ennemis au Maréchal Soult, foncez! Quand à vous autres, prépa.... »
Je n'ai pas eu le temps de terminer ma phrase, des soldats me montraient derrière moi une menace bien plus importante. Un drapeau avec un Lys bleu qui se déplaçait à toute allure vers nous. Des cavaliers! Et ceux ci allaient foncer sur ma compagnie, je savais que je ne pourrais jamais former un carré défensif à temps.
«Première ligne, baillonettes au fusil, les autres, préparez vous à faire feu sur mon ordre. » hurlais je aux hommes.
Les braves de la première ligne n'écoutaient que leur courage. Ils mettaient leur baillonnette à leur fusil puis ils se mettaient à genou, le fusil plantait dans la terre la baillonette en avant, j'entendais certains d'entre eux citer le Pater Noster, d'autres le Ave Maria ou bien encore insulter le destin en se demandant ce qu'il faisaient là. J'étais en seconde ligne avec les hommes prêt à faire feu, mon revolver en main.
« Ne tirez qu'à mon ordre, et tirez sur les chevaux! » hurlais je encore.
Jamais des secondes m'avaient paru durer aussi longtemps, j'entends encore les pas des chevaux accéléraient leurs cadences à chaque mètres effectués, je me souviens d'avoir vu les insignes du célèbre Bob Razine qui était en tête de ses troupes, j'observais attentivement cette vague qui allait déferler sur nous, cette vague inarrêtable, que Dieu ait pitié de mes hommes. Lorsque je sentais que les cavaliers étaient assez prêt, environ 150 mètres de ma position, j'ordonnais de faire feu.
Les balles touchèrent 4 cavaliers qui chutaient lourdement.
« Deuxième ligne! Baillonnettes au fusil! »
Les hommes se dépêchaient de mettre leur baillonettes mais les cavaliers n'étaient plus qu'à quelques mètres, les lances pointaient vers l'avant, Razine le sabre à la main.
J'entends encore le « Chargez! Pour le Roi! ».
L'instant fatidique était arrivé, comme la vague sur le rocher, le choc fut terrible, ma première ligne fut partiquement balayée entièrement, les hommes étaient embrochés, certains la tête décapitée par des coups de sabre, mais nous tenions encore en première ligne et nous nous battions, les cavaliers repartaient aussi rapidement qu'ils étaient venus. Leurs pertes étaient légères 3 hommes de plus, pour moi c'était beaucoup plus élevé outre les nombreux blessés qui tenaient encore debout, cette charge me couta 30 hommes de plus. Nous étions 180 au matin, nous voilà plus que 150 hommes dont 25 blessés.
Un spectacle effroyable s'offrait à mes yeux, les corps sans vie des mes frères d'armes, les plaintes inhumaines des blessés, l'odeur de la poudre et de la mort. Tous mes sens étaient en état de choc, je restais immobile, je ne savais plus où aller, je ne savais que faire, jusqu'à ce que la raison me revienne, je réorganisais mes hommes pour que notre défense soit meilleure, mais Dieu étaient contre moi ce jour là. Alors que le carré se formait, je voyais des grenadiers, l'élite du Lys, le Duc Michka les diriger. Je savais alors que l'objectif de ses traitres étaient d'annihiler ma compagnie pour effrayer les autres. Je sentais la peur et la mort monter autour de moi, était-ce aujourd'hui mon dernier jour?
Alors que le tambour ennemi jouait le Domine salvum fac regem, je voyais les royalistes monter avec une hargne et une ferveur incroyable, cette musique montait en puissance en même temps que la troupe, le Duc Michka était en première ligne avec ses hommes au côté du drapeau et du tambour, les hommes s'approchaient de plus en plus, et l'ordre de la charge fut prononcé.
Mes hommes subissaient une lourde charge, cette lutte pour la vie était héroïque, chaque homme se surpassait et dominait sa peur, mais l'ennemi était supérieur à mes hommes et beaucoup perdaient la vie, une trentaine d'hommes d'après un caporal contre une dizaine russe.
Mais Micka voulait détruire ma compagnie, et il me renvoyait ses hommes au combat, lui avec. Cette charge fut encore plus destructrice que la précédente, aucune pitié de la part de mon ennemi, mes hommes prenaient la fuite, alors que je me battais avec un soldat du lys, deux de mes hommes le tuaient à bout portant et me demandaient de fuir, ils allaient me couvrir, jamais je ne les reverrais.
Alors que nous fuyons comme des laches, j'entendais les hourras de l'ennemi, mes larmes coulaient sur mon visage, des larmes de tristesse, de colère et de honte, fuir devant l'ennemi, quel déshonneur!
Mes hommes courraient autour de moi, nous cherchions à nous abriter des horreurs que nous venions de subir. Je voyais certains d'entre eux jettaient leur fusil, d'autres criaient sauve qui peu, d'autres hurlaient leur douleur, certains portaient leurs camarades blessés ou morts, nous venions de subir une débacle et je n'ai su me montrer à la hauteur de mes hommes.
Nous voyons enfin des régiments français, des camarades du Ivème corps, les troupes du CAM Guila nous accueillaient. J'étais encore sous le choc, j'étais encore présent sur le champ de bataille, je pensais encore aux hommes morts là bas, je pensais au combat qui venait de se dérouler sous mes yeux, ai-je été un bon officier?
Un caporal me ramenait à la réalité en me disant.
« Prêt pour l'appel mon Capitaine. »
« Merci Caporal Fontaine! » Je me dressais en saluant le caporal qui se remettait devant les hommes et je voyais mes survivants, une petite poignée. Je commençais l'appel, seulement 80 hommes m'ont répondu dont la majorité était des blessés. Seulement 80 hommes rescapés de cette boucherie. Je commençais un discours pour leur montrer mon respect et mon honneur de diriger ces hommes exemplaires.
« Mes braves, aujourd'hui, vous avez combattu comme des lions! Je suis fier de vous, devant un ennemi supérieur en nombre et rusé, vous avez su montrer à l'ennemi et aux soldats de la grande armée votre courage et votre bravoure!
Vous avez été aussi exemplaires que nos aïeuls de Valmy.
Messieurs, je suis fier d'être votre Capitaine, je suis fier de combattre à vos côtés, j'espère que nous aurons encore d'autres combats mais victorieux! Nous verrons à notre tour ces traitres fuirent le champ de bataille et nous vengerons nos camarades morts pour la patrie aujourd'hui.
Mes braves, nos camarades tombés sont des héros tout comme vous, souvenez vous de ce jour, gardez votre rancoeur et votre hargne pour massacrer l'ennemi la prochaine fois car d'autres luttes, d'autres combats, d'autres batailles nous attendent! Messieurs, je vous ai promis Moscou et vous l'aurez! »
Je regardais mes hommes silencieux, tous impassibles et quelques hommes encore debout au garde à vous.
« Messieurs, je vous salue! Repos! » Les hommes disutaient entre eux, certains étaient prêts à retourner au combat, d'autres attendaient le médecin de campagne pour soigner leurs blessures, j'en voyais d'autres pleurer leurs camarades morts laissés sur le champ d'honneur. J'interpellais mes deux caporaux encore vivants, je leur demandais d'aller chercher à boire et à manger pour les hommes.
Quand à moi, Guila m'attendait pour que je lui fasse mon rapport sur les combats des marais. Je lui racontais l'excursion des voltigeur, la charge de Razine, les charges de Michka, et mes pertes effroyables 100 morts ou portés disparus. Le CAM Guila m'ordonnait de prendre du repos car la 21253ème allait être recomplétée, réarmée et allait repartir en première ligne d'ici peu.
J'allais avec un interprète à Ostankino chercher un prêtre pour que mes hommes puissent être enterrés sous le regard du seigneur, notre aumonier qui est campement du Ivème est bien trop loin pour donner le dernier sacrement. J'entrais dans une église de la ville avec l'interprète pour demander la bienveillance et l'aide de ce prêtre. Il acceptait ma requête et nous suivait hors d'Ostankino près de nos lignes, il ne me quittait pas car sa présence aurait pu être assimilée à de l'espionnage.
Mes hommes avait creusé une fosse où une dizaine de corps avait pu être ramenés du champ de bataille, le prêtre bénissait ces corps qui rejoignaient le Seigneur, je voyais certains de mes hommes pleurer leurs camarades, peu d'entres eux restaient dignes à ce moment là, moi même les larmes me venaient quand je voyais ces hommes alignés l'un contre l'autre unis dans la mort comme ils l'étaient dans le combat.
Le prêtre finissait la cérémonie, pour le remerciait de son dévouement et de son courage, je lui donnais une bourse de pièces d'or, je le faisais raccompagner par trois de mes hommes afin d'assurer sa sécurité.
Le reste de la troupe et moi recouvrons les cadavres, puis nous avons posé au dessus du talus une croix où on pouvait lire ses quelques mots.
« Ici reposent des enfants de la France, que Dieu dans sa grande mansuétude les accueille dans son paradis. »
Cette phrase était suivie des noms des hommes que l'on avait pu reconnaître et 4 inconnus. J'ordonnais à mes troupes de se diriger vers Ostankino afin qu'ils se reposent dans une maison réquisitionnée. Je les rejoindrais un peu plus tard. Quand ils étaient tous partis, je me recueillais devant cette croix, m'interrogeant sur mon sort.
« Pourquoi suis-je encore en vie? Pourquoi les avoir rappeler si tôt? Ce n'était que des enfants pour la plupart? Pourquoi m'as tu épargné? Qu'ai-je donc fait pour mériter ta miséricorde alors que je n'ai pas su sauver ses vies? Seigneur aide moi! »
Aucune réponse ne venait soulager mon esprit ni mon âme.
Je devais maintenant m'acquiter d'une tâche importane, je devais écrire aux familles des défunts que leur père, fils ou frère était mort au champ d'honneur, je devais leur faire croire qu'ils étaient mort en héros pour le bien de la patrie, pour le bien de la France, pour le bien de l'Empereur.
Triste tâche et triste mensonge dont je dois m'acquiter.
Chaudard
separateur
Récits
Cela fait maintenant 2 jours que nous sommes arrivés au front. L’ennemi Français n’est pas loin. De rares échanges de plombs nous sapent le moral plus qu’ils ne font de dégâts, mais suffisent à faire douter mes hommes. A peine le calme semble t’il durer qu’une nouvelle salve nous fuse aux oreilles. On se protège comme on peut, sans pouvoir riposter… Ordre de préserver les munitions à tout prix…
La fatigue commence à se faire sérieusement sentir, et nous ne pouvons pas nous permettre de dormir trop longtemps. D’après le peu de renseignements qui nous parviennent, l’assaut est pour bientôt. Espérons que la nuit sera calme.

Au levé du jour, les canons ennemis commencent leur travail infernal. Sur notre droite, les gerbes de boue ne laissent aucun doute. Nos camarades du 35e bataillon se font tailler en pièces. Certains hurlent, mais jamais longtemps. Un tir arrive toujours pour les faire taire à jamais. Dans les yeux de mes hommes, la haine se mêle à la peur, et chacun semble se demander : « Seront-nous les prochains ? »

La réponse ne se fit pas attendre. Les balles qui nous arrivèrent dessus ne laissèrent aucun doute. Un regard vers l’ennemi : il avance ! Je tente de rassurer mes hommes.
« Mes amis, notre heure de gloire approche ! Vérifiez vos fusils et fixez les baïonnettes ! »
Chacun vérifia que son arme était chargée, et que la poudre du bassinet n’était pas trop humide. Les baïonnettes sortirent des fourreaux dans un bruit métallique à vous glacer le sang. L’ennemi s’était arrêté. Mais l’assaut était imminent.
Alors que nous surveillons les fusiliers devant nous, un groupe de voltigeurs arriva au pas de course sur notre gauche. Il semblait venu de nulle par.

« Ne tirez pas ! », hurlais-je à mes hommes, « Ils sont trop loin ! ». Trop tard. Un premier coup parti, puis le reste de mes compagnons appuya sur la détente. Nous nous retrouvâmes enveloppés d’un épais nuage de fumée. Impossible de voir les voltigeurs ennemis. Le temps semblait s’être arrêté.
« Rechargez ! Rechargez que diable ! »
Mes hommes semblaient fébriles. La peur et la fatigue faisaient leur office. Tant bien que mal, les mains tremblantes, ils rechargèrent leurs armes. Ils n’eurent pas le temps de finir.
Parfaitement synchronisés, les voltigeurs ouvrirent le feu. Les dizaines de fusils n’émirent qu’une seule détonation. Bon dieu, ils doivent être bien proches ! Quelques-uns de mes hommes s’écroulèrent.
Le nuage de fumée commençait à se dissiper, me laissant apercevoir celui laissé par les voltigeurs, mais aucun voltigeur. Ils étaient déjà repartis.

Tout les regards étaient tournés vers ce nuage, et personne ne vis ce qui se tramais sur notre droite. La détonation nous fit nous retourner plus vite que l’éclair. Des hommes tombèrent, d’autres criaient. Un deuxième groupe de voltigeurs venait de faire son œuvre. Paniqués, mes hommes ouvrirent le feu, sans grand succès. L’ennemi avait encore une fois frappé vite et bien. Après des jours sans tirer une seule balle, nous venions de perdre bêtement deux coups de feu chacun.
« Rechargez ! », hurlais-je à nouveau, « Et attendez mon ordre pour tirer ! »

Les fusils à nouveau opérationnels, un clairon nous fit lever les yeux. Cet air de clairon, nous ne le connaissions que trop bien, et il suffisait à lui seul à faire paniquer nombre de soldats aguerris. La charge fut brutale. Surgissant entre les lignes ennemies, le bataillon de dragons fondait sur nous. Nous tirâmes une salve, dont les résultats furent à peine visibles, tellement la masse de cavaliers avançait vite. Mes hommes dressèrent leurs baïonnettes en une herse épaisse, mais chacun savait que le choc seul suffirait à les anéantir. Les dragons brandirent leurs pistolets. Les balles ajoutèrent quelques morts dans nos rangs, puis on entendit les sabres sortir de leurs fourreaux.

L’impact fut terrible. Mes hommes furent renversés sur l’arrière, certains piétinés par les chevaux, d’autres éventrés dans la mêlée par nos propres baïonnettes. Les plus chanceux eurent la tête tranchée par un sabre Français. Les dragons repartirent aussi vite qu’ils étaient venus. Certains jonchaient le sol, mais ils ne représentaient que quelques corps, à coté des russes tombés depuis le début de la bataille.
Les survivant se relevèrent et ramassèrent leurs fusils, inutilisables. La boue avait pénétré les canons. Chacun sorti sa baguette et commença le nettoyage, faisant ressortir un maximum de terre.

« Dépêchez vous ! Pissez dans vos canons nom de Dieu ! »
C’était la seule méthode éprouvée dans ce genre de situation. Je jetais un œil vers la ligne ennemie droit devant nous, et je vis les grenadiers fixer leurs baïonnettes. Les plus rapide de mes hommes étaient déjà en train de recharger.

« En ligne sur trois rangs ! Premier rang genoux à terre ! »
Ils s’exécutèrent. La vision de la ligne de grenadiers les fit frémir, mais ils tenaient. Dans un cri de sauvage, l’ennemi lança sa charge. Cette fois ci, hors de question de perdre encore une salve.

« Ne tirez pas Messieurs ! Attendez mon ordre ! Attendez encore un peu ! Feu !!!!! »
Les balles partirent. Des grognards tombaient à terre, nous les avions touchés ! Mes hommes de premier et deuxième rang dressèrent alors leurs baïonnettes. Le troisième rang rechargea ses armes. Chacun savait maintenant ce qu’il avait à faire. La ligne de grenadier vint s’empaler sur nos baïonnettes, le combat rapproché fut sanglant, et nombre de mes hommes y laissèrent la vie. Ma troupe était déjà bien décimée.
Le troisième rang n’avait pas fini de recharger ses armes qu’une deuxième ligne de grenadiers s’avançait déjà vers nous. Nos rangs, parsemées de trous béants laissés par nos morts, sentirent la peur s’abattre sur eux. La troisième ligne lâcha ses fusils, et partit en courant. Les deux premières suivirent aussitôt. Les blessés, agonisant et hurlant, furent laissés sur place. Je n’oublierais jamais leur regard implorant, et la haine qu’il y avait dans leurs yeux en nous voyant partir.
Chaque homme courrait aussi vite que possible, sans se soucier de ses camarades. Certains, trop lent pour ceux qui courraient derrière, furent mis à terre. Ils ne se relevèrent pas. Les grognards français continuaient de courir vers nous, transperçant à coups de baillonette les survivants russes qu’ils croisaient. Pui ils lâchèrent une salve. Quelques morts et blessés de plus parmi ma compagnie…

L’ennemi poussa un cri de victoire. Mes hommes, arrivés hors de portée, cessèrent leur course. Je les rejoignis. Certains pleuraient, heureux d’être en vie, relâchant la fatigue et le stress de ces derniers temps, ou pensant à leur compagnons abandonnés aux mains de l’ennemi.

Comment leur en vouloir ? Déjà éprouvés par la fatigue, l’ennemi avait soigneusement planifié sont attaque. Depuis la diversion d’artillerie sur le 35e bataillon, jusqu’aux multiples charges. Nous n’avions aucune chance. C’est même un miracle que nous ayons tenus aussi longtemps. Je fis un rapide compte : plus de la moitié de ma compagnie manquait à l’appel, et nos fusils avaient été abandonnés à l’ennemi. L’état major ne comprendrais pas, et la cour martiale n’était pas très loin de moi.

Essayant de chasser ces idées noires, je pris la parole.
« Messieurs, cessez de pleurer. Nos camarades sont morts au nom de la Sainte mère Russie ! C’est un honneur pour eux ! » Je n’en pensais pas un mot, mais c’était de mon devoir de réconforter mes hommes comme je le pouvais. « Vous avez fait ce qu’il était possible de faire, mais la défaite était inévitable. Je ne sais pas ce que l’avenir nous réserve, mais soyez certains que nos amis seront vengés ! »
Personne ne répondit, pas un bruit, à par les cris lointains des français. Nous avions failli à notre mission, et l’ensemble du plan russe était maintenant compromis. Nous restâmes assis quelques temps, puis je me mis en route vers le Poste de Commandement. En marchant, je réalisai soudain que peut-être je ne reverrais jamais mes hommes. Je serais tenu pour responsable de cette défaite, et devrait rendre des comptes à la mère patrie.

Me pardonnera t’elle ?
Pierrlot
separateur
citation
La diversion ennemie que vous ignorez est en fait l'attaque principale.
Ender ar Tewen
separateur
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